L’avalée des avalés : Réjean Ducharme

Ce document a été créé et certifié chez IGS-CP, Charente (16)

 

Je n’oublierai pas de sitôt cette lecture. Quelle claque ! Et quel ravissement… Dès les premières lignes, l’écriture de Réjean Ducharme part à l’assaut et assène au lecteur une sacrée gifle. J’ai tendu sans hésiter l’autre joue, puis je me suis présentée tout entière, bien de face, pour recevoir les mots rageurs de Bérénice, jeune héroïne ducharmienne en guerre contre les adultes et les lâches. J’ai encaissé ses invectives, ses mots fous, ses mots inventés, ses mots qui triturent, qui dissèquent, ses mots qui terrassent, ses mots qui magnifient, qui envoûtent, qui transportent par leur poésie hybride, toute d’ombre et de lumière. Des mots à foison qui m’ont avalée et que j’ai ingérés, goulûment. Une écriture incroyablement belle, exaltante, épuisante, qui exprime la soif inassouvie de Bérénice Einberg dans sa recherche d’absolu, de découverte d’elle-même, et dans sa volonté d’en découdre avec la terre entière, jour et nuit. Petite fille de parents monstrueux et défaillants, elle aurait pu se briser et se faire engloutir par les adultes. Que nenni ! Sa rage est à nulle autre pareille et terrasse quiconque, toujours victorieuse.

 

Voici comment elle se présente dans un incipit-lame-de-fond : souffrance d’être perdue dans le monde et volonté de se posséder :

 

« Tout m’avale. Quand j’ai les yeux fermés, c’est par mon ventre que je suis avalée, c’est dans mon ventre que j’étouffe. Quand j’ai les yeux ouverts, c’est par ce que je vois que je suis avalée, c’est dans le ventre de ce que je vois que je suffoque. Je suis avalée par le fleuve trop grand, par le ciel trop haut, par les fleurs trop fragiles, par les papillons trop craintifs, par le visage trop beau de ma mère(…) »

 

Il faut dire qu’elle a de quoi être perturbée la petite Bérénice. Elle vit avec ses parents et son frère Christian sur une île du grand fleuve canadien le Saint-Laurent, dans une ancienne abbaye « aux quatre toits de tuiles rouges », « plus pointus que des fers de hache, plus escarpés que des falaises », au-dessus de laquelle passe un pont ferroviaire qui cache le soleil. Les trains font trembler les murs, secouent les lits et les rares rayons de soleil que le pont n’a pas filtrés sont arrêtés par d’épais rideaux de velours qui pendent aux fenêtres. Dans cette abbaye se joue une véritable « Guerre de Trente ans » qui oppose le père Mauritius Einberg à sa belle jeune épouse surnommée « Chat Mort » par sa fille. Ils ne se supportent pas et se sont partagé les enfants : à la mère le premier enfant né, c’est-à-dire Christian, et au père le second, ce sera Bérénice. Chaque parent impose à sa partie un enseignement religieux : catholique pour Christian, judaïque pour Bérénice. Et chaque parent impose aussi à « son » enfant une vision détestable, fielleuse, de l’autre, l’ennemi à abattre. Les repas finissent en champs de bataille et les portes souvent claquent, laissant toujours derrière elles des cris haineux. Cette fureur, Bérénice n’est pas la dernière à y prendre part. Elle aussi joute verbalement, empoigne, gueule, vocifère, cogne, pince…

 

Les deux enfants cependant sont profondément attachés l’un à l’autre. Leur relation est intense, fusionnelle, et même incestueuse vue des yeux de Bérénice. Elle idolâtre son frère dont elle a tant besoin de la douceur. Il est son compagnon de jeux avec qui elle explore le jardin de l’abbaye, les caves, la crypte et aussi les marais de l’île. Ces moments d’enfance, de jeux et d’émotions partagés sont fabuleux à lire.

Mais un jour surgit toute une ribambelle de cousins invités un été par « Chat Mort » et avec eux la redoutable Mingrélie, si belle et dont Christian tombe amoureux. L’été devient insoutenable, moite, nocturne, hypnotique, les croisières programmées sur le Saint-Laurent se transforment en sabordages et en naufrages et c’est « Chat Mort » qui supervise les batailles (ces pages sur l’été dans l’île sont superbes…). Bérénice, arrivée au faîte de sa souffrance, déborde de fureur et son amour pour Christian devient encore plus obsessionnel. Le père, ulcéré, la chasse et l’exile à New York chez un parent, Zio, patriarche ultra-orthodoxe qui s’est investi de la mission de panser et de guérir les âmes. Bérénice passera cinq années loin de l’île vénéneuse mais connaîtra dans la grande ville d’autres poisons. Elle n’aura de cesse de se battre contre les prisons (famille, religion, école) pour devenir une adolescente encore plus dure, plus détachée des autres :

 

« Je suis une alchimiste rendue folle par des vapeurs de mercure. J’aimerai sans amour, sans souffrir, comme si j’étais quartz. Je vivrai sans que mon cœur batte, sans avoir de cœur ».

 

Elle devient boulimique de connaissances, de lectures, ingurgite des cours de tout et n’importe quoi : Ses pensées et réflexions ne cessent de jaillir, grouillent, débordent et elle abreuve de logorrhées ceux qu’elle côtoie. Elle se veut forte dans sa vision sur le monde, forte dans sa solitude et son âme, sans attaches et découvrir qui elle est ; elle déclare : « Je choisirai le sol de chacun de mes pas ».

 

Vous voilà prévenus ! Pour entrer dans ce roman, il vous faudra affronter Bérénice la guerrière, Bérénice qui peut être monstrueuse. Ses armes langagières pourront vous blesser, vous choquer. Peut-être demanderez-vous grâce, sonnés et fatigués : j’ai peiné quelquefois et j’avoue que les cinquante dernières pages m’ont laissée de côté ; de plus, ses inventions linguistiques et ses emplois fréquents de mots peu usités peuvent vous donner le tournis ! (Un conseil : laissez tomber le dictionnaire et amusez-vous, laissez-vous porter par les jeux de mots, les mystères du sens, c’est si agréable de ne pas tout maîtriser). En tout cas je suis sûre que la puissance poétique de l’écriture de Réjean Ducharme vous ravira, littéralement. Il y a dans ce roman des fulgurances incroyables : je termine par cette phrase de Bérénice :

 

« La lumière est une rivière qui m’appelle et qui a quelque chose à son extrémité. Quelqu’un qui suit la vérité jusqu’au bout, qui en a la force, est quelqu’un qui escalade un rayon de soleil et finit par tomber dans le soleil ».

 

Merci beaucoup à Madame lit qui m’a fait découvrir ce si beau livre et la journée « le 12 août, j’achète un livre québécois ». Je connais enfin (un peu mieux) l’auteur québécois Réjean Ducharme. Cet auteur qui n’avait que 24 ans quand est sorti son tout premier roman L’avalée des avalés chez Gallimard en 1966. Un auteur mystérieux qui préserve farouchement son anonymat, alors que son œuvre est couronnée de succès : Prix du Gouverneur Général, Grand Prix national des lettres, officier de l’Ordre national du Québec et dernièrement voici que L’avalée des avalés entre dans le Registre du patrimoine culturel du Québec (merci Marie-Claude d’Hop !  sous la couette  pour le lien )

 

Ed. Gallimard « Folio » (1982)
1ère édition aux éditions Gallimard la « Blanche » en 1966

 

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Une île : Fanny Michaëlis

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L’album Une île nous raconte le combat intemporel entre l’homme et la mer. Un pêcheur et sa femme vivent sur une presqu’île « dans [une] baie isolée du reste du monde ». Derniers habitants d’un village qui se meurt faute de naissances, ils affrontent au quotidien une mer rageuse qui n’a de cesse de balayer et de tourmenter de ses flots ce pauvre petit bout de terre. Elle en serait d’ailleurs facilement et rapidement venue à bout si elle n’avait accepté un jour un pacte proposé par les villageois : « Tant qu’un des leurs foulerait de ses pieds le sable de ses côtes, elle ne pourrait engloutir la péninsule. En échange de quoi, ils se contenteraient de pêcher à marée basse et épargneraient la faune de ses grands fonds ». Mais la mer finit par se lasser, s’impatiente dangereusement, ses vagues se gorgent de fureur, grossissent de plus en plus. Et un jour, miracle ! La femme du pêcheur tombe enceinte. Il y aura donc encore âme qui vive pour tenir tête à la mer. Mais la petite fille qui naît est minuscule, telle une Poucette, « pas plus grande qu’un noyau de cerise », et la mère, brûlante de fièvre, mourra en couches ; le combat est-il perdu d’avance ? Rien n’est moins sûr. Il semblerait que notre héroïne lilliputienne en sorte victorieuse…

Ce beau récit, qui prend sa source aux contes et aux mythologies, Fanny Michaëlis l’accompagne d’illustrations en bulles d’écume, virevoltantes, éclatantes de légèreté, de délicatesse, d’étrangeté, d’onirisme et grouillantes de vie.

Le format à l’italienne sied à merveille à ces dessins qui regorgent de détails. L’aspect pictural est très fort. On pense à la finesse des miniatures persanes. Il y a un soin tout particulier apporté aux motifs des tissus, à la trame des filets de pêche, au tissage des nasses, aux écailles des poissons, aux carapaces des crevettes, aux coquillages…On goûte aussi à la délicatesse des estampes japonaises avec des scènes de pêche et une faune marine rappelant l’art d’Hokusai et d’Hiroshige.

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Et la douceur de la femme du pêcheur devenue mère, sa toute petite fille endormie dans ses fabuleux cheveux roux, est le reflet lumineux et tout en courbes de la partie centrale du tableau Les 3 âges de la femme de Klimt.

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La chevelure de la mère est fantastique, de même que la barbe du père, rousse également, dans laquelle se réfugie l’enfant ; l’enfant qui ne se sépare jamais de l’étrange poche de fourrure dans laquelle elle est née :

 

« Elle traînait partout derrière elle ce pelage qui conservait l’odeur de sa mère. Dévalant la montagne, soulevée comme une plume par le vent et les embruns, parcourant la forêt, les plages et le sommet des arbres. Poussière, racines, graines, insectes et coquillages s’emmêlaient dans les poils qui avaient poussé avec le temps. »

 

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Cheveux et poils se tissent, s’entrelacent, semblent pousser indéfiniment, se mêlent aux algues et aux courants, se font le curieux fil conducteur de cette histoire : enveloppant la petite fille et la protégeant de la mer en furie qui engloutit tout sur son passage, ils la mèneront jusqu’à une île féerique, luxuriante, bien loin de la presqu’île « sèche et désolée. »

 

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Il y a une puissance onirique qui renvoie à la maternité, et à la paternité. La naissance est célébrée avec faste. Les illustrations délicates et éclatantes de Fanny Michaëlis (les couleurs sont très belles) débordent d’imaginaire et invitent tous les possibles. Tout est mouvant, se transforme, croît, est fluide, liquide…

Un ravissement pour les yeux du lecteur, qu’il soit petit ou grand. Mon petit garçon a ainsi été captivé par les poissons : il s’est régalé avec les narvals, les anguilles, les bars, les poissons multicolores…Laissez -vous emporter vous aussi par les flots de cet univers singulier, atypique, chatoyant et envoûtant.

 

Si vous voulez poursuivre le voyage, plongez- vous dans le précédent album jeunesse de Fanny Michaëlis, toujours aux éditions Thierry Magnier, Dans mon ventre.

 

Et, dans une très belle tonalité noir et blanc, cette fois-ci exclusivement réservées aux adultes, découvrez ses BD publiées aux éditions Cornélius : Avant mon père aussi était un enfant, Géante et Le lait noir.

 

Bien sûr, vous ne manquerez pas de visiter le site de Fanny Michaëlis.

 

Publié aux éditions Thierry Magnier en septembre 2015.

J’ai toujours ton coeur avec moi : Soffia Bjarnadottir

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« Lorsque Siggy est morte, j’ai eu envie de réclamer ses yeux à l’entrepreneur des pompes funèbres. Je me demandais si l’on pouvait hériter d’une paire d’yeux. S’il était courant que les proches du défunt réclament leurs organes favoris. J’imagine ses pupilles qui me fixent effrontément depuis l’au-delà. Je n’ai toutefois jamais formulé cette requête et, avant que j’aie eu le temps de dire ouf, Siggy était redevenue poussière. Ses yeux, des étoiles dans un ciel de ténèbres. »

 

Un incipit qui nous plonge d’emblée dans l’étrange, les ténèbres, la force d’une présence, celle de Siggy. Siggy était mère et c’est sa fille, Hildur von Bingen, qui nous parle. Elle est effarée en apprenant la mort de celle qui l’ « avait élevée, seule et à son étrange manière ». Elle est désorientée : « Morte. Elle n’était plus mon nord ni mon sud, ni mon est ni mon ouest. » Un manque effroyable, un « trou dans le cœur ». Et pourtant, que de souffrances vécues avec Siggy, que de terribles moments partagés quand elle était petite fille. Siggy l’insaisissable, l’amarre impossible, la boussole détraquée qui laisse tournoyer l’aiguille affolée dans le vide…

Dans ce premier roman, l’auteure islandaise Soffia Bjarnadottir nous conte l’amour singulier qui lie une mère folle, souffrant de troubles bipolaires, à sa fille, luttant comme elle peut pour ne pas se laisser emporter par le même mal. Une relation toxique déchirante qui se pare de beautés inattendues et insensées : les souvenirs du quotidien avec Siggy, les cauchemars récurrents, les visions étranges qui assaillent Hildur recèlent une indéniable poésie ; une poésie sombre bien sûr, quelquefois funeste, mais aussi solaire. Il s’agira pour Soffia Bjarnadottir de nous montrer la part de vie, de lumière, qui existe en Hildur von Bingen et qui existait en Siggy.

Hildur a vécu avec sa mère jusqu’à ses seize ans, en Islande. Leur quotidien, qu’a partagé un moment Petur, le grand frère, était spécial, éprouvant. Hildur était spectatrice d’un film qui recommençait chaque jour, mettant en scène la mort et la renaissance de sa mère, tour à tour désespérée et euphorique, follement joyeuse :

 « Aussi loin que je me souvienne, maman a toujours brûlé de l’intérieur. Comme Narcisse, elle était en quête de sa propre flamme. Du feu originel. Dans ma jeunesse, elle possédait les pouvoirs caractéristiques du phénix. Un oiseau millénaire qui bat des ailes et renaît de sa propre déchéance. Régulièrement, elle rejaillissait des cendres, belle et fraîche, le soleil éclairant son visage. Impossible d’endurer la vie avec de tels personnages. Terre calcinée et odeur de brûlé à chaque pas. Puis voilà que cet ersatz de phénix s’élève comme le soleil à l’aube, et nous demeurons en arrière, la face grise de cendres. On dirait que rien ne peut affecter ces gens-là. Ainsi était Siggy. Mon frère et moi étions spectateurs, et toute notre vie a eu le goût des cendres. »

Hildur se réfugie de temps à autre chez sa grand-mère, une femme taiseuse, terre- à- terre, qui la replonge dans la normalité en lui préparant notamment de vrais repas, du poisson accompagné de pommes de terre, qui remplace les oranges que Siggy peut lui servir midi et soir, pendant des jours, « la couleur des agrumes la mettant de bonne humeur. »

Hildur un jour n’en peut plus et, accablée de fatigue, fuit cette prison de folie maternelle. Elle a l’envie de « disparaître sans laisser de trace. Comme un lombric sous la terre ». Elle fuit même l’Islande, parcourt le monde et devient archéologue. De chantier en chantier, elle fouille les pierres, les débris et se construit comme elle peut. Mais ses démons l’accompagnent, dans des rêves éveillés le jour, dans des cauchemars la nuit ; et il y a les souvenirs, « des morts-vivants qui ne reçoivent d’ordres de personne. »Cela la laisse souvent sans force, paralysée par la peur de devenir folle elle aussi.

Siggy va resurgir dans sa vie. Alors qu’elle est sur un chantier de fouilles en Finlande, on lui annonce un jour au téléphone que sa mère est morte et qu’elle lui a légué une maison sur l’île de Flatey, en Islande, dans le Breidafjördur, une île perdue dans « le silence et l’odeur d’algue (…) où les phoques sur la plage ont des yeux d’homme et la terre est toujours humide pour peu qu’on cherche des lombrics à la nuit tombée ». Elle revient donc au pays maternel, curieuse de découvrir cette maison avec pour seul bagage quelques vêtements et une lettre rédigée par Siggy.

La maison sur l’île surprend Hildur, qui ne reconnaît pas les traces que Siggy a laissées, comme si cette femme lui était inconnue, semblant avoir mené là, alors qu’elle y passait ses derniers jours, une vie simple et peut-être heureuse. Le trouble d’Hildur s’en va grandissant lorsque pour les funérailles de sa mère, elle voit l’amant de celle-ci, surnommé Kafka, un homme qui lui était sincèrement attaché, brisé par le chagrin. Puis elle rencontre David, « au corps tranquille », aux mains rassurantes, qui la couve chaleureusement de ses étranges yeux vairons. Dans la dualité du regard de cet homme se reflète l’affrontement entre la mort et la vie, la folie et le réel, la souffrance et la guérison, qui ont toujours habité Hildur. Et surtout, il y a cette lettre, que lui a adressée Siggy, qui contient des mots qu’elle n’a jamais entendus.

Hildur, « une fillette solitaire », « une enfant qui tissait une toile avec des veines et des vaisseaux, qui creusait la surface du monde pour s’assurer qu’à l’intérieur c’était le vide absolu ». Se sentira-t-elle grandie et apaisée, enfin, sur cette île maternelle isolée et balayée par les vents ?

J’aurais tant de choses à dire sur ce roman de Soffia Bjarnadotir. Son écriture simple, ses images étranges et saisissantes, ses cours chapitres qui font se succéder les incursions dans la folie et les retours au réel, les souvenirs et les instants présents sur l’île, m’ont bousculée et beaucoup touchée. C’est un livre précieux, douloureux, que j’aimerais offrir un jour, peut-être, à ma fille. Beaucoup de ténèbres, certes, mais aussi une belle lumière. Une réelle passation s’opère au fil des pages entre une mère et sa fille, mobilisant à la fois la mort et surtout la vie.

Je vous invite également à lire la belle chronique d’Abigail dans Le monde de Tran qui, alors que je ne l’avais pas encore lu ce livre, avait achevé de me convaincre.

Et je terminerai en vous citant ce poème d’E.E. Cummings qui a donné son titre français à ce roman :

« J’ai toujours ton cœur avec moi
Je le garde dans mon cœur
Sans lui, jamais je ne suis
Là où je vais, tu vas ma chère
Et tout ce que je fais par moi-même,
Est ton fait, ma chérie.
Je ne crains pas le destin
Car tu es à jamais le mien, ma douce.
Je ne veux pas d’autre monde
Car, ma magnifique,
Tu es mon monde, en vrai.
C’est le secret profond que nul ne connaît.
C’est la racine de la racine,
Le bourgeon du bourgeon
Et le ciel du ciel d’un arbre appelé Vie
Qui croît plus haut que l’âme ne saurait l’espérer
Ou l’esprit le cacher.
C’est la merveille qui maintient les étoiles éparses.
Je garde ton cœur, je l’ai dans mon cœur. »

(J’ai toujours ton cœur avec moi, in 95 Poèmes, 1958)

 

Publié par les éditions Zulma en janvier 2016.